"Jazz en Scènes", le festival hivernal de la FEDELIMA (fédération des lieux de musiques actuelles), se déroule du 11 au 15 décembre sur l'ensemble du territoire avec pour cette quinzième édition 23 lieux, 44 concerts et 144 musiciens. C'est dans ce cadre que La Fabrica'son a choisi cette année deux formations intimistes, à la délicatesse surprenante : le binôme (Duo Wood) et le trinôme (Trio Tiffany's), soit 2 puissance 2 pour l'une et 2 puissance 3 pour l'autre : multiplicité de configurations... Le mathématicien Cantor avait raison, nous ne sommes pas au bout de nos surprises avec ce qu'il appelait "l'infinité d'infinis", car le jazz a largement un penchant probabiliste, c'en est même sa quintessence.

Sans trop de digression, revenons à la FEDELIMA. Depuis le 1er janvier 2013, la Fédé, anciennement la FSJ (fédération des scènes de jazz) - à laquelle la Fabrica'son appartenait - a fusionné avec la FEDUROCK pour donner LA FEDELIMA. C'est un réseau national qui regroupe 135 lieux sur le territoire. Majoritairement associatifs, ils assument un rôle déterminant sur le plan artistique et culturel tant à l’échelle régionale que nationale, voire parfois internationale. Et pourtant, ce réseau fédéré reste malgré tout insuffisant pour diffuser l'ensemble des projets créatifs qui fourmillent sur le territoire ; il est saturé comme tous les autres réseaux de diffusion.
Force est de constater que la problématique professionnelle du musicien devient complexe et se traduit par une concurrence que les experts en économie qualifieraient d'effet Dumping. En d'autres termes, quand l'offre reste largement supérieur à la demande et qu'il n'y a pas d'organisation solidaire entre les musiciens pour décider du minima des salaires et des conditions d'embauche, les musiciens se voient accepter et proposer des rémunérations de plus en plus basses (à la recette, au chapeau, cachets non déclarés, parfois rien du tout....)
Que ce soit LA FEDELIMA ou les collectifs de musiciens qui émergent de ci, de là, ces organisations sont absolument essentielles aujourd'hui pour assurer la pérennisation de la profession et le respect des musiciens, mais elles restent malheureusement insuffisantes. Dans un monde musical fortement hiérarchisé, saturé et concurrentiel, l'emploi ne peut être que précaire. De plus, dans ce monde de la musique régi par le statut de l'intermittence, le métier comme l'a écrit la sociologue Marie Buscatto, se caractérise par une hyper flexibilité et une compétition incessante entre ses membres du fait de sur-effectifs permanents. Quoi faire me direz-vous ? Dans l'état actuel des choses, aucune solution durable n'est envisageable. Tant que la société, avec sa politique, ne subira pas un profond bouleversement quant à son orientation et qu'elle continuera à s'en remettre aux dieux de la finance - qui tirent les ficelles depuis bien trop longtemps déjà - ce problème finira par gangrener l'esprit du jazz.

Benoist